Hollande fait confiance aux actionnaires

mercredi 8 juin 2016
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VOILÀ une mesure qui va permettre de voir claire­ ment la « différence entre la gauche et la droite », a proclamé Valls, le 20 mai. Désormais, pour fixer la rémunération des patrons, les conseils d’administration devront se soumettre à la volonté des actionnaires. Le contraire de ce qui s’est passé chez Renault, le 29 avril, quand le conseil a maintenu la rémunération de Ghosn (7,2 millions), malgré le vote négatif de l’assemblée générale. Pas sûr que cette modification légale modère la gloutonnerie supposée des patrons.

Une société de conseil aux actionnaires, Proxinvest, a eu l’idée d’étudier les décisions prises en 2015 par 327 assemblées générales de boîtes françaises cotées en Bourse. Pas une seule n’a rejeté la rémunération de ses dirigeants. Et le taux d’approbation a même été quasi stalinien : 89%, en moyenne, de votes favorables. Renault est, en réalité, l’exception qui confirme la règle. Pour une raison simple : l’Etat actionnaire, qui pèse 26 % des droits de vote, ou, plus exacte­ ment, le ministre de l’Economie, Emmanuel Macron, est en guerre ouverte avec Ghosn.

Hormis ces bisbilles personnelles, tout baigne entre actionnaires et patrons. Qu’on en juge : le 20 avril, Jean-Paul Agon, le président de L’Oréal, a vu sa rémunération de 9 millions (2 millions de plus que Ghosn) bénie par 96 %de ses actionnaires.
De même le 29 avril, celle de François-Henri Pinault (3,6 millions) a été plébiscitée à 97 %. Les 16,8 millions d’Olivier Brandicourt ont reçu l’approbation de 63 % des actionnaires de Sanofi. Et encore 75% de oui, le 18 mai, à Carrefour, pour les 7 millions de rémunération du patron, Georges Plassat. Etc.

La mesure prônée par Valls va être ajoutée, sous forme d’amendement à la loi Sapin 2 sur la transparence financière, ont décidé les députés, le 26 mai. Mais elle ne fait qu’anticiper la directive européenne Shareholders Rights, qui dit la même chose et entrera de toute façon en vigueur en 2018. Du coup, la mesure « de gauche » est plutôt une mesure pour rire. Mieux : elle confortera les rémunérations les plus extravagantes, grâce à l’onction des assemblées générales souveraines.
Exactement le contraire du but recherché…

H M Le canard enchaîné du 1er juin 2016



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