le mur de Bush suscite l’indignation au sud de la frontière

dimanche 8 octobre 2006
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Dans une précédente brève nous faisions part des réticences aux USA mêmes que provoquait la décision de construction du mur. Cet article montre à quel point cette décision indigne les éditorialistes d’Amérique centrale et du Mexique.

Les travaux ont déjà commencé...
AFP

Le président George W. Bush a promulgué mercredi 4 octobre une loi finançant la création de barrières fortifiées sur la frontière mexicaine. La loi prévoit l’octroi de 1,2 milliard de dollars à la construction d’un mur de plus de 1 100 kilomètres qui sera achevé d’ici au 31 décembre 2008. Le Congrès américain avait adopté à une large majorité le texte le 29 septembre dernier. De leur côté, réunis en sommet à Zambrano, au Honduras, les pays d’Amérique centrale et le Mexique ont fermement rejeté le principe de la construction du mur, qui suscite une vague d’indignation dans la presse hispanique.

Dans El Diario de New York, quotidien hispanophone américain, l’éditorialiste Jorge Ramos s’étonne de la "suprême naïveté" dont fait preuve le Congrès américain en pensant qu’un mur pourrait stopper les candidats à l’immigration clandestine venant du Sud. "Une erreur longue de 1 100 kilomètres", titre le journal. "Au lieu de trouver une véritable solution au problème des clandestins, les Etats-Unis utilisent la force.

Le gouvernement américain s’attaque au thème de l’immigration illégale comme s’il s’agissait d’une guerre. Mais ce n’en est pas une. Les immigrés qui traversent la frontière vers le Nord ne sont pas membres d’Al-Qaida." Le problème est économique, insiste Jorge Ramos, et, si les membres du Congrès américain avaient voulu réellement le résoudre, ils auraient inscrit dans la législation deux choses essentielles : la régularisation des 12 millions de clandestins et l’octroi de visas pour les 500 000 personnes qui arrivent chaque année.

"Il est important de rappeler une considération élémentaire : le blindage de la frontière ne mettra pas un terme au flux migratoire causé par l’asymétrie économique entre les Etats-Unis et ses voisins du Sud", écrit La Jornada, quotidien mexicain de gauche, dans son éditorial. En fait, "ce sera plus dur et plus risqué de franchir la ligne de démarcation et cela se traduira par plus de morts et de grandes souffrances parmi ceux qui cherchent au nord du Rio Bravo des opportunités inexistantes sur leur propre terre en raison de l’inefficacité du gouvernement mexicain".

De plus, "devant le besoin manifeste de main-d’Å“uvre dans l’économie américaine, il est clair que la répression des migrations clandestines ne cherche pas à rompre ce phénomène, mais à le réguler pour faire baisser les salaires des travailleurs étrangers et utiliser ce thème en fonction des intérêts électoraux de la classe politique de Washington". Le journal d’opposition au président Vicente Fox reproche aussi aux cercles du pouvoir mexicain d’avoir choisi le camp des intérêts politiques et entrepreneuriaux du pays voisin. D’où le titre de l’éditorial : "Le mur, c’est le succès du foxisme".

Mais, au-delà des considérations économiques, le mur a une forte dimension symbolique et politique. De même que l’anticommunisme aux Etats-Unis avait mené à une traque hystérique durant les années du maccarthysme, rappelle un éditorialiste de La Nación, au Costa Rica, "aujourd’hui, le temps de la peur s’installe de nouveau dans la puissance du Nord. Au nom de la liberté, le Sénat américain a approuvé ces derniers jours des lois pour combattre le terrorisme et les immigrés illégaux." Certes, poursuit l’éditorialiste, "les démocraties ont besoin de se défendre. Mais, parce qu’elles ne sont pas des dictatures, elles ont l’obligation d’employer des méthodes distinctes. Affaiblir les libertés ne peut être la recette."

Dans son éditorial, La Hora du Guatemala se montre amère face au mépris affiché par l’administration nord-américaine à l’égard de ses voisins pauvres du Sud. Il semble loin le temps où, après les attentats du 11 septembre 2001, l’Amérique cherchait à construire de véritables alliances et à se faire des amis, constate le journal. "Le mur sera vu comme une insulte aux peuples qui devraient être les alliés naturels des Etats-Unis." Au-delà de l’obstacle physique, il "exprime une séparation culturelle et raciale d’envergure", estime ce journal.

Article paru dans le "Courrier international".

Transmis par : Linsay.



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