MOULINS MAUREL : Seule la lutte rend possible la victoire !

jeudi 13 mars 2014
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En 2000, Panzani décide de se porter acquéreur des Grand Moulins Maurel, jusque là propriété de la famille Skalli (Rivoire et Carret, Lustucru). C’est alors que les grandes manœuvres de démantèlement des moulins de la Valentine commencent. Les syndicats n’y sont pas en ordre de marche. Conséquence : 14 ans de galère ! Aujourd’hui les salariés avec la CGT ont repris fermement leur destin en main.

Ancien responsable logistique de l’usine, père d’un garçon jouant le championnat canadien de hockey sur glace, une casquette américaine éternellement vissée sur la tête, Édouard Pagni dégage une force joyeuse et communicative. Ce nouveau secrétaire général du syndicat CGT des Moulins Maurel avec quelques collègues a réussi le tour de force d’enrayer la spirale de l’échec dans laquelle se trouvait son entreprise. Voici ce qu’il nous a expliqué.

« Celui qui lutte peut perdre, mais celui qui ne lutte pas a déjà perdu »

Bertolt Brecht repris par les Fralib.

Exceptionnelle en Europe, la Grande Minoterie de la Méditerranée fondée en 1860 sous le nom de Grand Moulin Maurel, est spécialisée dans la fabrication de farine et de semoule. Installée dans le 12e arrondissement de Marseille, cette unité fait parti du patrimoine industriel de la ville.

Mais, en 2000, la famille Skalli souhaite se défaire de son usine. Panzani se porte alors acquéreur et fait tourner les moulins jusqu’en 2008. Eux aussi, sans aucune explication, souhaitent se défaire de l’usine. N’étant pas en déficit les moulins ne peuvent pas fermer pour raison économique. Ils doivent donc trouver un repreneur. Mais en partant ils emmènent avec eux le carnet d’adresse des clients des Grands Moulins Maurel. Cela sent le coup fourré !

Rachetée par NutriXo en 2008 [1], l’usine voit 70 % de ses débouchés assurés par un contrat signé avec ... Panzani. De 2008 à 2013 les moulins vont donc produire 55 000 tonnes de farine par an pour Panzani, mais avec quel profit pour NutriXo ? L’usine tourne alors avec 70% inactivité. Petit arrangement entre amis pour une fin programmée ?

Et ce qui devait arriver, arriva : la direction, pour justifier la fermeture du site en 2013, produit un communiqué expliquant que Panzani ne souhaitant pas renégocier le contrat de fourniture signé en 2008, et se voit contrainte de mettre la clé sous la porte.

Depuis l’annonce de cette fermeture les salariés se battent pour obtenir l’annulation du plan de sauvegarde de l’emploi et surtout pour trouver un repreneur sérieux. Car NutiXo ne fait même pas semblant de chercher un éventuel acheteur. Y aurait-il une opération immobilière là-dessous ?

Avec la CGT, les salariés se sont réorganisés syndicalement, alors que le représentant de FO choisissait de partir avec ses « deniers de Judas ». Le 29 novembre 2013, n’acceptant pas la stratégie de casse du groupe NutriXo, les salariés décident l’occupation de leur usine afin de la mettre sous leur protection. « En mettant leur outil de production sous leur protection, ils s’opposent ainsi à toute éventualité de démantèlement. Nutrixo doit assumer ses responsabilités. Avec le soutien des collectivités locales, la CGT et les travailleurs exigent qu’un délai plus long soit mis à la disposition des élus du personnel et des experts pour que toutes les solutions alternatives à la fermeture du site soient étudiées, sous l’égide des pouvoirs publics afin de garantir l’efficacité dans la recherche de solutions pérennes sans pression d’aucune sorte. »

Depuis les tables rondes se succèdent et le processus d’achat semble être sur la bonne voie. Réunis en comité d’entreprise, les représentants du personnel ont présenté leur rapport à la direction. Une première étape avant de demander l’aide de l’Etat pour éviter la fermeture de l’usine. "Nutrixo est une filiale de Siclae dont l’Etat est actionnaire [http://www.siclae.com/siclae-en-bref/index.html] C’est donc a lui de prendre ses responsabilités". Une aide qui pourrait, selon les salariés, se concrétiser par une table ronde en préfecture pour trouver une alternative à la fermeture. "Si Nutrixo veut partir, il faut trouver un repreneur, mais il ne faut pas nous mettre de bâtons dans les roues"

Un bras de fer "qui risque d’être long. De toute façon, on n’a rien à perdre, on fera comme les Fralib". Mais c’est une situation difficilement supportable. "C’est dur, on a 20 ans de boîte et beaucoup ont une famille à nourrir" explique Edouard Pagni. "Mais on ne doit pas fermer ! On est d’utilité publique, la farine est à la base de l’alimentation".

Le silence médiatique interroge aussi les salariés. La ville de Marseille a-t-elle un projet foncier et immobilier au moment où les 3 hectares du site s’élèvent à 12 millions d’euros ?
Le Tribunal de Grande Instance doit se prononcer sur le mal nommé Plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) que les salariés ont rebaptisé Plan de sabordage de l’emploi puisqu’ « il ne sauve rien, on demande son annulation », revendique Edouard Pagni.

En effet comment expliquer qu’une entreprise véritablement d’intérêt public et indispensable à l’indépendance alimentaire de notre pays puisse ainsi faire l’objet d’un tel marchandage ?

Sauver l’outil industriel et les emplois maintient le moral du collectif des travailleurs. « Si en tant que père je gérais ma famille comme l’Etat gère la France, mes enfants suceraient des glaçons et mangeraient des cailloux », fustige Edouard Pagni qui a le sens de la formule.

Alors, changeons d’État, redonnons le pouvoir au peuple et la gestion des entreprises aux salariés eux-même puisque ce sont eux qui produisent la richesse que s’approprient les actionnaires pour jouer au grand Monopoly du marché mondial.

La_peniche


[1NutriXo, issu du regroupement des Grands Moulins de Paris, d’Euromill et d’Inter-Farine, est le Co leader de la meunerie en France et l’un des premiers acteurs du secteur en Europe. Le groupe a une double activité : La Meunerie avec les marques Francine, Campaillette, Ronde des Pains, Les Pains Campaillou, Copaline, Au Cœur des Pains, Les Tendres, Moulbie et Melix. La boulangerie-viennoiserie-pâtisserie (BVP, fabrication de produits essentiellement surgelés, avec les marques Provencette, Délifrance et Appétit de France



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