La révolution en cours en Islande

mercredi 4 avril 2012
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Un nouvel article sur la révolution en cours en Islande...ce pays dont la presse ne parle plus beaucoup

À mesure qu’un pays européen après l’autre fait face a une quasi-faillite, mettant en péril l’euro, l’Islande devient un phare d’espoir pour avoir choisi les gens avant le profit. Voici pourquoi.

Cinq ans d’un régime néolibéral ont conduit à une privatisation de toutes les banques en Islande, (320.000 habitants, pas d’armée). afin d’attirer les investisseurs étrangers. Ces banques offraient des services bancaires en ligne dont les coûts minimes leur ont permis de fournir des taux de rendement relativement élevés.

Ces comptes bancaires, appelés Icesave, ont attiré de nombreux petits investisseurs anglais et néerlandais. À mesure que les investissements augmentaient, les dettes étrangères des banques augmentaient aussi. En 2003, la dette de l’Islande équivalait à 200 fois son PNB (produit national brut), et en 2007, elle était de 900 pour cent.

La crise financière mondiale de 2008 devint le coup de grâce. Les trois principales banques islandaises firent faillite et furent nationalisées, tandis que la couronne (monnaie de l’Islande) perdit beaucoup de sa valeur par rapport à l’euro. A la fin de cette année-là, le pays se déclara en faillite.

Les citoyens récupèrent leurs droits

Contrairement aux attentes mondiales, la crise a conduit la population à prendre le contrôle de son pays, à travers un processus de démocratie participative directe. Ceci a finalement conduit à une nouvelle constitution, mais seulement après une persévérance féroce.

Geir Haarde, le premier ministre d’une coalition gouvernementale sociale-démocrate, négocia un prêt important. Mais la communauté financière étrangère fit pression pour que l’Islande impose des mesures drastiques.

Des protestations et des émeutes s’ensuivirent, obligeant finalement le gouvernement à être remplacé par une coalition de gauche nouvellement formée.

La coalition se plia finalement face aux exigences provenant de l’extérieur et selon lesquelles l’Islande devait payer une dette totale qui aurait exigé de chaque Islandais de payer 130 $ par mois pendant quinze ans, à 5,5% d’intérêt, afin de rembourser une dette contractée par des parties privées vis-à-vis d’autres parties privées. Ce fut la goutte d’eau qui fit déborder le vase.

Ce qui s’est passé ensuite fut extraordinaire. La croyance selon laquelle les citoyens devaient payer pour les erreurs d’un monopole financier, qu’une nation entière devait être taxée afin de rembourser les dettes privées, fut brisée.

Les relations, animées entre les citoyens et leurs politiciens, habilitèrent les dirigeants de l’Islande à agir aux cotés de leurs électeurs. Le chef de l’État,Olafur Ragnar Grimsson, refusa de ratifier la loi qui rendait les Islandais responsables des dettes bancaires et soutint les appels à la tenue d’un référendum.

La communauté internationale furieuse

Le communauté internationale ne fit qu’accroître la pression. La Grande-Bretagne et la Hollande mirent le gouvernement et la population islandaises en garde contre des représailles terribles qui isoleraient le pays, incluant l’arrêt de l’aide du FMI et le gel des comptes bancaires islandais étrangers.

Lors du référendum du mois de mars 2010, 93% de la population votèrent contre le remboursement de la dette. Le FMI gela immédiatement son prêt. Mais l’Islande n’allait pas se laisser intimider. Comme Grimsson le dit : « On nous a dit que si nous refusions les conditions de la communauté internationale, nous deviendrions le Cuba du nord. Mais si nous les avions acceptées, nous serions devenus l’Haïti du nord ».

Avec le soutien des citoyens furieux, le gouvernement lança des enquêtes civiles et pénales contre les personnes responsables de la crise financière. En conséquence, l’ancien ministre des Finances purgea une peine de prison de deux ans, alors qu’Interpol émit des mandats d’arrêt internationaux contre les banquiers impliqués dans le krach.

Les Islandais se mirent également d’accord sur certaines mesures de réduction budgétaire comme le démantèlement de leurs infrastructures militaires - l’IslandicDefense Agency (Agence islandaise de la défense, ou IDA), cessa d’exister en janvier 2011.

La nouvelle constitution de l’Islande

Afin de libérer le pays du pouvoir exagéré de la finance internationale et de l’argent virtuel, le peuple islandais décida de rédiger une nouvelle constitution.

La population procéda à l’élection de 25 citoyens parmi 522 adultes n’appartenant à aucun parti politique, mais recommandés par au moins trente personnes. Les réunions des électeurs furent diffusées en ligne, et les citoyens purent envoyer leurs commentaires et suggestions, étant les témoins de ce document à mesure qu’il prenait forme.

La constitution qui émergea de ce processus de démocratie participative fut soumise au parlement pour approbation à l’automne.

On a dit au peuple grec que la privatisation de leur secteur public était le seul moyen de garder le pays à flot. Les peuples de l’Italie, de l’Espagne et du Portugal sont confrontés à des pressions similaires.

Ils pourraient, ainsi que le reste d’entre nous, apprendre beaucoup de l’Islande, en refusant de se plier à des intérêts étrangers et en déclarant haut et fort que les gens peuvent reprendre et reprendront leur pouvoir.

Par Deena Stryker le 30/03/2012 source stjornlagarad.is

Traduit par VicFlame

Transmis par Linsay

Une question sur laquelle cet article fait l’impasse est celle du débat en cours sur l’adhésion ou non de l’Islande à l’UE. Alors qu’en 2009 le pays a fait acte de candidature, aujourd’hui une majorité des islandais (56% contre 26%) est hostile à une entrée dans l’UE et le gouvernement fait pression en sens inverse (voir encadré ci-dessous)...ce qui tempère quelque peu le ton idyllique de l’article

Le gouvernement islandais veut abandonner sa monnaie

_ Le Premier ministre islandais a indiqué que ses concitoyens avaient le choix entre l’adoption d’une monnaie étrangère ou bien l’entrée dans l’euro.

_ Un ultimatum très politique.

_ L’Islande ne veut plus de sa propre monnaie. Dans un discours prononcé devant les délégués de son parti, l’Alliance sociale-démocrate, le Premier ministre de l’île nordique, Johanna Sigurdardottir, a indiqué que les jours de la couronne, la monnaie nationale, était comptée. "Le choix se situe entre "l’abandon de la souveraineté du pays en matière de politique monétaire en adoptant unilatéralement la monnaie d’un autre pays ou devenir un membre de l’Union européenne." Mais pour le chef du gouvernement islandais, "la situation ne peux pas rester en l’état".

_ Crise de 2008

_ Petite économie d’une dizaine de milliards d’euros de PIB pour quelques 380.000 habitants, l’Islande a été l’une des premières victimes de la crise de 2008. Ses banques démesurées au regard de la richesse nationale se sont effondrées dans la foulée de la crise financière internationale. Leurs engagements en devises les ont largement dépassées et elles ont dû faire appel au gouvernement qui a fait appel à la planche à billets. Le déficit public a atteint 12 % du PIB en 2009 et évolue encore aux alentours de 7 %. Consulté par référendum, les Islandais ont refusé de payer les créanciers d’Icesave, banque active aux Pays-Bas et au Royaume-Uni qui avait fait faillite en 2008.

_ Difficile stabilité monétaire

_ Depuis, la Sedlabanki, la banque centrale islandaise, tente de sauvegarder la stabilité de la monnaie, souvent en vain. Vendredi, elle a acheté 12 millions d’euros pour soutenir la couronne. Pour une économie aussi ouverte et petite que l’Islande, les variations monétaires sont très néfastes. Plusieurs petites économies ont du reste adopté des monnaies étrangères dans le passé : le Luxembourg utilisait ainsi le franc belge, le Liechtenstein utilise le franc suisse, la couronne danoise est attachée de près à l’euro...

_ Négociations avec l’UE

_ C’est du moins l’analyse de Johanna Sigurdardottir, arrivée au pouvoir le 1er février 2009, et qui s’est engagé à l’été 2010 dans une démarche d’adhésion à l’Union européenne (UE). Pour le moment, les négociations patinent autour de la question de la pêche qui reste un secteur vital pour l’île. Or, l’ouverture des eaux nationales et les restrictions posées par l’UE ne plaisent guère aux Islandais. Surtout, la crise de l’euro a rendu bien peu attrayante la monnaie unique européenne. Selon les sondages, 56,2 % des Islandais ne souhaitent pas entrer dans l’UE, contre 26,3 % qui le souhaitent.

_ Raisons politiques

_ Le Premier ministre entend donc montrer à ses concitoyens qu’ils n’ont guère le choix. Pour stabiliser son économie, l’Islande ne peut selon elle choisir qu’entre la dollarisation ou l’euro. Et d’avancer : l’avantage de ce dernier réside dans le fait que Reykjavik aura alors son mot à dire. Sinon, elle devra subir les choix étranger sans rien dire. Les déclarations de Johanna Sigurdardottir sont donc avant tout politiques, elles visent à faire pencher à nouveau la balance populaire en faveur de l’UE. Son but est toujours de faire entrer l’Islande dans la zone euro en 2015. (Romaric Godin. La Tribune du 12 mars 2012)



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