Droits humains : la France condamnée

vendredi 10 février 2012
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Le sort des Popov avait ému et mobilisé nombre d’Ardennais.

CHARLEVILLE-MÉZIÈRES (Ardennes). Cette famille kazhake interpellée à Charleville en 2005 a bataillé jusqu’en 2009 pour obtenir le statut de réfugié. La France a été condamnée par la CEDH.

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LA Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) vient de condamner la France.
Ce n’est pas une première.
Ce qui est plus inédit, c’est qu’une partie des motifs qui ont conduit la juridiction à donner raison aux requérants a son origine dans les Ardennes…
En effet, ces plaignants, au demeurant beaucoup d’Ardennais s’en souviennent, il s’agit de la famille Popov.
Les parents, Vladimir et Yekaterina, avaient quitté le Kazakhstan (en 2002 pour l’un, en 2003 pour l’autre) où ils étaient persécutés « du fait de leur origine russe et de leur appartenance à la religion orthodoxe », rappelle la Cour dans son arrêt.
Débuta un long, très long feuilleton, de longues années jalonnées de procédures, d’interpellations, de séjours en centre de rétention ou… en clandestinité, des années durant lesquelles allaient naître leurs enfants en 2004 et 2007.

Rappel des faits tels que la CEDH elle-même les égrène…

En juin 2005, la préfecture des Ardennes notifiait aux époux Popov le rejet de leurs demandes de titre de séjour et les enjoignait de quitter la France dans un délai d’un mois.

En novembre de la même année, le père était interpellé lors d’un contrôle routier. Placé en rétention administrative à Charleville, il apprenait les rejets de ses demandes d’annulation de mesure de reconduite à la frontière.

En octobre 2006, les Popov étaient assignés à résidence, toujours dans les Ardennes, et deux tentatives de reconduite à la frontière échouaient en raison de la mobilisation de collectifs de soutien, rappelle encore la cour dans son arrêt.

Le 29 janvier 2007, la préfecture des Ardennes rejetait une nouvelle demande de délivrance d’un titre de séjour, et les Popov faisaient de nouveau l’objet d’une injonction à quitter le territoire. Sans effet.

Et finalement, cerise sur le gâteau _ si l’on ose dire _ et drôle de pierre dans le jardin de l’ancienne école du Génie, le 16 juillet 2009, « le statut de réfugié, demandé par les requérants avant leur arrestation, leur fut octroyé, au motif que l’enquête menée par la préfecture des Ardennes auprès des autorités kazakhstanaises, au mépris de la confidentialité des demandes d’asile, avait mis les requérants en danger en cas de retour au Kazakhstan… » Sachant que de toute façon, le pays d’origine avait déchu les Popov de leur nationalité !

No comment…

Devant la Cour européenne, les Popov contestaient les placements en rétention (surtout de leurs enfants, à Rouen) qui jalonnèrent leur parcours, d’une décision de justice à une autre en passant par des embarquements finalement avortés (faute d’avion, parfois !).
Ils ont été entendus (en partie).

La juridiction est extrêmement sévère. « La Cour constate que l’aménagement des centres de rétention habilités à recevoir des familles en France dépend de la volonté de chaque chef d’établissement, notamment concernant la mise en place d’infrastructures adaptées à de jeunes enfants.

Si, au centre de Rouen-Oissel, les familles sont séparées des autres détenus, seuls des lits d’adultes en fer sont disponibles, dangereux pour les enfants, qui ne bénéficient par ailleurs d’aucune activité ou espace de jeux et sont exposés à la dangerosité de la fermeture automatique des portes de chambre.

Le commissaire aux droits de l’homme et le Comité européen pour la Prévention de la Torture ont aussi souligné que la promiscuité, le stress, l’insécurité et l’environnement hostile que représentent ces centres ont des conséquences néfastes sur les mineurs, en contradiction avec les principes internationaux de protection des enfants, selon lesquels les autorités doivent tout mettre en œuvre pour limiter autant que possible la durée de détention des mineurs.

Une période de quinze jours de rétention, sans être excessive en soi, peut paraître infiniment longue à des enfants vivant dans un environnement inadapté à leur âge.

Les conditions de vie des enfants des requérants, une fillette de trois ans et un bébé - alors même qu’ils étaient accompagnés de leurs parents - se trouvant dans une situation de particulière vulnérabilité accentuée par l’enfermement ne pouvaient qu’entraîner une situation d’angoisse et de graves répercussions psychiques.

La Cour conclut que les autorités n’ont pas pris la mesure des conséquences inévitablement dommageables pour les enfants d’un enfermement en centre de rétention. »

La Cour a rejeté en revanche la requête concernant la rétention des parents.

Par ailleurs, la CEDH a une nouvelle fois indiqué _ et ce n’est pas seulement vrai pour les Popov _ que la situation des enfants nés en France de parents demandeurs d’asile relevait… d’« un vide juridique »…

La France a in fine été condamnée à verser 10 000 euros pour dommage moral aux requérants…

Par Ph.M. source l’Union le 08/02/2012

Transmis par Linsay



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