Tout ce qui brille est... pétrole...mais pas dollar

vendredi 3 février 2012
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L’impérialisme occidental contesté par des nations qui ne veulent ni de la guerre ni de la toute puissance du dollar. Le monde capitaliste est traversé de visions contradictoires qui peuvent être en elles mêmes un point d’appui pour les militants pacifistes.

Dans son adresse sur l’État de l’Union, le président des États-Unis, Barack Obama, a déclaré : « Qu’il n’y ait aucun doute : l’Amérique est déterminée à empêcher l’Iran d’acquérir l’arme nucléaire, et je garde toutes les options sur la table pour atteindre ce but. »

Dans le monde réel, cela signifie que Washington est prêt à entrer en guerre - la guerre économique est déjà en cours - contre un pays signataire du Traité de non-prolifération nucléaire et qui ne recherche aucunement l’arme nucléaire, si l’on en croit même l’Agence internationale de l’énergie atomique et le dernier National Intelligence Estimate (évaluations officielles du directeur du renseignement national US - ndt).

Obama a aussi déclaré : « Le régime (de Téhéran) est plus isolé que jamais ; ses dirigeants sont confrontés à des sanctions paralysantes, et tant qu’ils fuiront leurs responsabilités, la pression ne fléchira pas ».

« Isolé » l’Iran ?Pas vraiment..

Et ce n’est pas la direction iranienne qui est soumise à des sanctions paralysantes ; c’est la majorité absolue des 78 millions d’Iraniens appauvris qui va en payer le prix.

Dans une déclaration précédente, Obama a « applaudi » à la décision de l’Union européenne d’imposer son propre embargo sur le pétrole iranien, ajoutant : « Ces sanctions démontrent une fois de plus l’unité de la communauté internationale ».

Alors, parlons de l’ « unité de la communauté internationale », dans laquelle sont inclus les États-Unis, les pays de l’OTAN (Organisation du Traité de l’Atlantique Nord), Israël et le GCC (Conseil de coopération du Golfe), qu’on appelle aussi le GCC (Club de la contre-révolution du Golfe) ; quant au reste du monde, il n’est juste qu’un mirage.

S’inscrire dans le programme pétrole contre or

Deux membres du BRICS, l’Inde et la Chine, achètent à eux deux au moins 40 % des exportations du pétrole iranien, environ 1 million de barils/jour. Cela représente 12 % des besoins en pétrole de l’Inde. Quant à la Chine, elle a acheté à l’Iran en 2011, 30 % de plus de pétrole qu’en 2010, soit une moyenne de 557 000 barils/jour.

La véritable « communauté internationale » est désormais très consciente que l’Inde va commencer à payer le pétrole iranien avec de l’or - pas seulement avec des roupies - par l’intermédiaire de sa banque d’État, l’UCO, et de la banque de l’État turc, la Bankasi. Pékin, qui commerce déjà avec l’Iran en yuan, pourrait aussi se tourner vers l’or. Inutile de dire que tant Delhi que Pékin sont de grands producteurs d’or et détiennent de gros avoirs en or.

Les BRICS

_ BRICS (anciennement le BRIC) est un acronyme anglais qui désigne le groupe de pays formé par le Brésil, la Russie, l’Inde, la Chine et l’Afrique du Sud (South Africa). Les cinq pays constituant les BRICS comptent 40 % de la population mondiale et, en 2015, ils devraient assurer 61 % de la croissance mondiale. Leur place dans l’économie mondiale croit fortement : 16 % du PIB mondial en 2001, 27 % en 2011 et d’après des estimations, 40 % en 2025.

_ Le PIB total du BRICS devrait égaler en 2040 celui du G6 (les États-Unis, le Japon, le Royaume-Uni, l’Allemagne, la France et l’Italie).
Le premier sommet des pays BRIC a eu lieu le 16 juin 2009 à Iekaterinbourg, en Russie.

_ Les pays composant le BRICS coopèrent économiquement en échangeant les ressources naturelles et technologiques. Le Brésil et la Russie produisent du pétrole et du gaz naturel, que la Chine et l’Inde consomment. L’Afrique du Sud, elle, exporte des métaux et d’autres minéraux.

_ Les BRICS pratiquent une politique d’indépendance envers les États-Unis. Ainsi aucun des membres n’a reconnu le Kosovo jusqu’à présent, (alors que Washington pratique un lobbying important pour cette reconnaissance) et ils se sont opposés aux interventions armées en Libye et en Côte d’Ivoire. De manière générale les BRICS plaident pour une refondation des organisations internationales comme le Conseil de Sécurité de l’ONU et les organisations de Bretton Woods (FMI, Banque mondiale) dans un sens qui reflète mieux l’émergence des nouvelles puissances non occidentales et le caractère multipolaire du monde au XXIe siècle. La mise en place d’échanges internationaux en utilisant une autre monnaie que le dollar va dans ce sens.

Parlons de l’Année du Dragon commençant par un boum. Et parlons de la nouvelle année de l’étalon or du Dragon.

Chacun se souvient du programme déplorable des Nations-Unies, "pétrole contre nourriture", qui a fait mourir de faim les Irakiens pendant des années avant leur invasion/occupation par les États-Unis en 2003. Les Irakiens moyens ont payé un prix terrible avec les sanctions ONU/USA, et le programme pétrole contre nourriture n’a profité qu’au système de Saddam Hussein.

Maintenant, il s’agit d’une affaire beaucoup plus grave : le programme pétrole contre or, une initiative BRICS et de l’Iran qui profitera à la direction de la République islamique et, peut-être, atténuera les effets des sanctions sur la population iranienne. Conséquences mondiales : l’or monte en flèche, le pétrodollar chute, les vendeurs de pétrole sabrent des bouteilles de Moët en pagaille.

Un autre membre du BRICS, la Russie, commerce déjà avec l’Iran en rial et en rouble. La Turquie, qui aspire à devenir membre du BRICS - et qui est aussi membre de l’OTAN - ne suivra pas les USA et l’UE sur les sanctions, à moins qu’elles ne soient imposées par le Conseil de Sécurité des Nations-Unies (ce qui ne risque pas, car la Russie et la Chine, membres permanents du CS, y opposeraient leur veto).

Dans deux mois, le Premier ministre Vladimir Poutine - qui irrite et terrifie Washington et Bruxelles autant que s’il était Vlad l’Empaleur - est certain [sic ! NDLR] de redevenir président de Russie. C’est alors que les caniches atlantistes verront une vraie partie de baseball.

En attendant, Téhéran ne se soumettra jamais aux sanctions occidentales - et encore moins compte tenu des multiples mécanismes latéraux/clandestins qui lui permettent de vendre son pétrole en impliquant les trois membres du BRICS, plus les alliés des Américains, le Japon et la Corée du Sud, qui finiront par obtenir des exemptions de l’administration Obama.

Comme on n’en est toujours qu’à une arme nucléaire qui n’existe pas, la direction de Téhéran n’a qu’à suivre un paramètre stratégique suprême ; ne pas céder devant les provocations ou une opération camouflée qui fourniraient le casus belli pour le déclenchement d’une guerre par l’axe États-Unis/Grande-Bretagne/Israël.

Et tout ceci alors que les tendances à l’horizon - qui se couvre - pointent ce qui pourrait être appelé, une "Zone asiatique d’exclusion du dollar", ce qui, pour beaucoup d’esprits éveillés du monde développé, pourrait ouvrir la voie à une monnaie qui s’appuierait sur l’énergie et qui serait utilisée par le BRICS et le Groupe des 77 (G-77) pour contrer l’Occident atlantiste de plus en plus prêt à tout - et de plus en plus nul.

Revenons au cirque des caniches européens. Il suffit d’examiner la déclaration commune publiée par ces médiocres monstruosités que sont le Premier ministre britannique, David Cameron, la Chancelière allemande, Angela Merkel, et le néo-napoléonien, le « libérateur de la Libye », le Président français Nicolas Sarkozy.

Ce trio a dit : « Nous n’avons rien contre le peuple iranien ». Les Irakiens ont entendu la même chose de la part d’une autre médiocrité, en 2002 et 2003. Puis, leur pays a été envahi, occupé, et détruit.

Par Pepe Escobar le 02/02/2012 Source : Info Palestine

Transmis par Linsay


Pepe Escobar est l’auteur de Globalistan : How the Globalized World is Dissolving into Liquid War (Nimble Books, 2007) et Red Zone Blues : a snapshot of Baghdad during the surge. Son dernier livre vient de sortir ; il a pour titre : Obama does Globalistan (Nimble Books, 2009).



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