La reconstruction communiste, le Front de Gauche et les élections de 2012

jeudi 15 septembre 2011
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Une contribution au débat parue sur la revue Chantiers

Les résultats du vote interne au PCF en juin dernier pour choisir le candidat du Front de Gauche donnent 28251 voix -soit 59,12% des votants- pour Jean-Luc Mélenchon, le candidat de la direction social-démocrate, et 17594 voix -soit 36,82% des suffrages- pour André Chassaigne, représentant de l’opposition à « l’effacement du PCF ». Avec les 1944 communistes -soit 4,07%- qui ont voté pour Emmanuel Dang Tran, 41% se sont opposés au total à la candidature Mélenchon.

En 2007, le processus pour une candidature unitaire et unique à la présidentielle émanant des collectifs anti-libéraux issus de la victoire historique du NON au traité constitutionnel européen (TCE) avait capoté et le front avait implosé avant le premier tour.

Aujourd’hui, les positionnements dans le PCF et dans de multiples groupes de la reconstruction communiste posent une question cruciale : « quelle campagne communiste mener dans le cadre du Front de Gauche anti-libéral élargi, ou comment visibiliser l’identité communiste dans le cadre d’une campagne commune avec les autres composantes anti-libérales à la présidentielle et aux législatives ? »

La résistance de classe et populaire a besoin d’un large front populaire combatif

Denis Kessler, ex-vice-président du MEDEF indiquait hier sans complexe le programme auquel s’attèle Sarkozy dans un article intitulé « Adieu 1945, raccrochons notre pays au monde ! » : « Le modèle social français est le pur produit du Conseil National de la Résistance (CNR), un compromis entre gaullistes et communistes. Il est grand temps de le réformer, et le gouvernement s’y emploie. Les annonces successives des différentes réformes par le gouvernement peuvent donner une impression de patchwork, tant elles paraissent variées, d’importance inégale, et de portées diverses : statut de la fonction publique, régimes spéciaux de retraite, refonte de la Sécurité Sociale, paritarisme... A y regarder de plus près, on constate qu’il y a une profonde unité à ce programme ambitieux. La liste des réformes ? C’est simple, prenez tout ce qui a été mis en place entre 1944 et 1952, sans exception. Elle est là. Il s’agit aujourd’hui de sortir de 1945, et de défaire méthodiquement le programme du Conseil National de la Résistance ! » [1].

De l’aveu même de Denis Kessler, cet « adieu à 1945 » est aujourd’hui une opportunité parce qu’il « aura fallu attendre la chute du mur de Berlin, la quasi-disparition du parti communiste, la relégation de la CGT dans quelques places fortes, l’essoufflement asthmatique du Parti Socialiste comme conditions nécessaires pour que l’on puisse envisager l’aggiornamento qui s’annonce. Mais cela ne suffisait pas. Il fallait aussi que le débat interne au sein du monde gaulliste soit tranché, et que ceux qui croyaient pouvoir continuer à rafistoler sans cesse un modèle usé, devenu inadapté, laissent place à une nouvelle génération d’entrepreneurs politiques et sociaux. Désavouer les pères fondateurs n’est pas un problème qu’en psychanalyse » [2].

A cette sortie cynique, qui éclaire sur les objectifs réels des patrons milliardaires et les raisons de leur réussite pour l’instant, vient s’ajouter la crise du capitalisme mondialisé qui accroît la recherche effrénée du profit maximum par :
1) l’appauvrissement de masse et la destruction des conquêtes sociales et démocratiques des travailleurs dans les pays impérialistes ;
2) les guerres, notamment les guerres coloniales, pour contrôler les matières premières comme le pétrole, l’uranium, etc.

La victoire du NON à la Constitution Européenne de 2005 est une ligne de démarcation structurante de la lutte de classe

Si nous comprenons la nécessité d’une vigilance vis à vis d’une dissolution éventuelle du PCF dans ce « Die Linke » à la française que pourrait être le Front de gauche, label dont le Parti de Gauche de Mélenchon est d’ailleurs propriétaire, celle ci ne saurait nous détourner sur le terrain d’une dynamique pour rassembler toutes les forces du NON, à l’exclusion des fascistes du FN, pour frayer la voie à une alternative anti-libérale dans ce pays. Le danger principal est en effet qu’en absence des forces de la reconstruction communiste, le Front de Gauche ne soit réduit à un simple cartel d’organisations. Or il s’agit de rassembler les forces anti-libérales pour favoriser le développement d’un vrai front populaire par lequel les travailleurs, le peuple pourraient passer à l’offensive contre les attaques patronales et gouvernementales.

La bataille pour le NON au TCE a tracé une ligne de rupture politique entre libéraux, sociaux libéraux et anti-libéraux. Cette ligne reste un vrai boulet que traînent les sociaux démocrates de la direction du PCF et du Parti de Gauche dans leur penchant réformiste à « l’Union de la Gauche » bis.

Il est d’une importance majeure que les forces de la reconstruction dans et hors du PCF trouvent les voies de l’unité d’action stratégique pour peser et contraindre à une rupture de classe entre sociaux libéraux et anti-libéraux. C’est une étape nécessaire pour aller vers l’unification des communistes sur la base léniniste du « se démarquer pour s’unir » dans une organisation unique.

La dialectique « défense de l’identité communiste » et « alliance des forces anti-libérales »

Tout comme le mouvement social, l’objectif de la campagne à mener est de battre la droite dure décomplexée sarkozyste, de montrer qu’avec les socialistes on a déjà donné, et que le pire reste le FN de Marine Le Pen. La résultante de ces impératifs est un « vote utile » allant dans le sens du rapport de forces nécessaire pour faire payer la crise aux milliardaires du CAC40 : le vote Front de Gauche à la présidentielle et aux législatives 2012.

Nous pouvons et devons faire cela en communistes, c’est à dire en développant nos exigences. Par exemple l’exigence de rupture avec la Ve République et son présidentialisme quasi monarchiste ; de refus de toute participation à un gouvernement socialiste ; de sortie de l’euro, étape vers la sortie de l’Union Européenne du capital et de la crise ; de laïcité sans discrimination à l’encontre notamment de la religion des travailleurs et des citoyens récents de France ; de punition effective du racisme ; de nationalisation des entreprises qui délocalisent ; de régularisation de tous les sans papiers avec une carte de 10 ans, d’arrêt des guerres coloniales en Libye, en Afghanistan, en Côte d’Ivoire ; de démantèlement des bases militaires françaises en Afrique et de sortie de l’OTAN.

Il n’y a pas de « muraille de Chine » entre la loyauté vis-à-vis du front anti-libéral et l’indépendance idéologique et politique des communistes qui œuvrent surtout à ce que l’alliance ne soit pas seulement une affaire de sommet mais deviennent l’affaire des travailleurs dans leur ensemble et donc du peuple.

C’est à cette politique que nous invitons l’ensemble des groupes de la reconstruction communiste éparpillés dans et hors du PCF. Cette unité d’action stratégique dans le front doit nous permettre d’éviter les départs successifs du PCF dans la désunion, la division et parfois dans des querelles stériles qui ne profitent qu’à l’ennemi de classe : notre bourgeoisie impérialiste fait tout pour prendre sa revanche de classe contre les victoires de nos anciens du temps de l’URSS patrie des ouvriers, paysans et peuples opprimés qui a succédé à la Commune, première démocratie prolétarienne !



[1Challenges, 4 octobre 2007

[2idem



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