Le prétexte

mardi 2 février 2010
par  Charles Hoareau
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Ainsi donc c’est décidé, Martine Aubry l’a dit, Georges Frêche est raciste. Et c’est inacceptable.

Tant qu’il ne s’en prenait qu’aux arabes et aux noirs cela pouvait passer. Ce n’était pas gentil mais cela ne nécessitait pas que le PS se mobilise face à lui.
Mais là dire de Fabius qu’il a une tête pas très catholique ce qui est soit de l’antisémitisme soit de la catholicophobie – allez donc savoir – on ne peut le tolérer.

Au passage cela me rend honteux car je reconnais avoir employé moi-même plus d’une fois une expression pareille sans saisir toute l’ignominie de cette formule et j’en demande pardon à Kamel ou Othmane, les derniers à qui je l’ai dit et que ça a bien fait rire (et moi avec) ce qui prouve qu’eux aussi n’avait pas compris à quel point j’étais raciste…ou catholicophobe.

L’expression est tellement odieuse que toute la presse en fait ses gros titres et nous détaille par le menu les réactions à droite comme à gauche qui sont bien sûr nombreuses et horrifiées.

Heureusement il y a le représentant du CRIF local qui, ayant droit lui aussi à son interview, nous assure que non, décidément non « Georges, qui est un ami n’est pas antisémite »…et pas raciste non plus ?

Frêche antisémite ? Alors qu’il finance à Sète l’installation d’AGREXCO, malgré l’opposition dans sa région, de toutes celles et ceux qui s’opposent à la politique d’apartheid d’Israël, antisémite alors qu’il n’a cessé, tout comme le PS d’ailleurs, de soutenir le sionisme destructeur et assassin des dirigeants de ce pays ? Cela serait fort étonnant.

Raciste oui et il l’a prouvé sans que cela n’empêche d’ailleurs nombre d’élus socialistes d’être à ses côtés ou un Gayssot pourtant auteur naguère d’une loi sur le racisme qu’en son temps nous avions salué, d’être son colistier au mépris du vote des communistes de sa région.

Ce dernier vient d’ailleurs de déclarer qu’il n’en avait pas honte…et c’est bien là le problème, mais passons.

Frêche n’est pas antisémite, ou en tous cas sa phrase ne le prouve pas. La raison de l’apparente colère du PS est ailleurs.

En Languedoc Roussillon il y a une liste à l’intitulé clair et éloquent : « A gauche maintenant ! » qui unit le PCF, le NPA et d’autres forces de gauche [1] qui se sont mises d’accord sur un programme, une liste et des valeurs au nom desquelles elles refusent tout accord ultérieur avec le raciste mégalo-septimano-maniaque qui préside la région. Evidemment cette liste, au-delà des forces qui la constitue, rassemble et attire les antiracistes, les vrais, celles et ceux qui ne supportent pas que certains hommes soient traités de sous hommes, que la politique relève du fait du prince ou qui ont en mémoire comment deux élus PCF furent éjectés de l’équipe sortante pour avoir osé s’abstenir sur le budget…

Un récent sondage, même si ce genre d’information doit être pris avec des pincettes, indiquait que cette liste avait de grandes chances de faire plus de 10% et donc de peser pour la suite et pas seulement pour le second tour. Le risque pour le PS c’est qu’une partie de son électorat ne préfère voter pour cette liste et que pour le reste de l’opinion il n’apparaisse pour ce qu’il est : un parti électoraliste, c’est-à-dire un parti capable de mettre dans sa poche avec un mouchoir dessus les idées généreuses qu’il avance par ailleurs si ces idées peuvent lui faire perdre des voix. C’est au fond le même électoralisme qui le conduit à s’allier avec le MODEM en mettant selon les endroits les formes nécessaires à cette alliance.

Et si les électeurs font mine de s’apercevoir de ce vilain défaut, vite on redevient un parti de gauche et on saisit la première occasion, voire on la crée, pour le démontrer. Cela s’appelle de la cuisine politicienne et cela n’a rien à voir avec le combat anti raciste. Pour tout dire ça le dessert.

Car soyons clair, si le PS décide de présenter sa propre liste face à Frêche, que fera-t-il au second tour ? Il appellera à voter pour qui ? Il s’alliera avec qui ? De même va-t-il aller jusqu’à exclure les milliers d’adhérent-e-s du PS qui soutiennent Frêche envers et contre tout ? Martine Aubry ou Benoit Hamon n’ont de cesse de calmer le jeu en proclamant qu’il n’y aura ni menaces ni purge. Le mégalomaniaque président de la Septimanie [2]l’a d’ailleurs bien compris quand il déclare :« je ne redoute rien du tout. »

Et puis la question de la gestion de la région ne se résume pas à Frêche or not to Frêche, mais à des choix qu’une véritable liste de gauche peut et doit faire pour résister au rouleau compresseur capitaliste national.

En quoi une liste dirigée par un PS présentable ou non peut elle s’opposer à la politique nationale et de quoi la région Languedoc Roussillon, c’est-à-dire ses chômeurs, ses précaires, ses salarié-e-s, ses mal logé-e-s ont-ils besoin en priorité ?

Dans ce pays qui s’est fait une spécialité des faux débats pour mieux masquer les vrais choix politiques, le vrai débat et là. A la liste « A gauche maintenant ! » de l’imposer avec l’appui de tous les progressistes et antiracistes que cette région connait.


[1dont ACC 11 membre de Communistes de France dont on peut lire en document joint le communiqué de presse à ce sujet

[2Après son élection à la tête de la région en 2004, Georges Frêche s’était mis en tête de changer le nom de la région Languedoc Roussillon en « Septimanie », nom donné au 5e siècle à une partie du sud de la Gaule et dont le découpage ne correspondait pas exactement à la région d’aujourd’hui. Une pétition de 45000 signatures et une manifestation rassemblant 8 000 personnes à Perpignan, le 8 octobre 2005, l’a conduit à renoncer à sa lubie.



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Communiqué de presse de <span class="caps

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