Lettre à Marie George Buffet

samedi 1er mars 2008
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André Gerin, député maire de Vénissieux sera à Allauch le 6 mars pour soutenir la liste Enfin la gauche à Allauch !

Chère Marie-George,

Quelle sera la situation politique pour le Parti communiste français après ces élections de mars 2008 ? Elles devraient être le point de départ d’une fantastique bataille politique contre la révolution conservatrice engagée par Nicolas Sarkozy avec l’UMP et les milieux de la finance. Il y a du grain à moudre pour montrer l’état de pourrissement dans lequel le capitalisme a plongé la société, s’attaquant désormais de façon frontale au socle républicain de notre pays, à son héritage progressiste et révolutionnaire.

Je suis bien d’accord avec toi pour penser que le PCF est le troisième parti de France. A mon sens, c’est parce qu’il a su, au fil de son histoire et de ses combats, porter la lutte des classes au plan politique, sans se fondre ni se confondre avec les institutions que le PCF demeure aujourd’hui le parti révolutionnaire dont la France a besoin.

Peut-on raisonnablement accepter la situation de Grenoble, Marseille ou ailleurs, en participant avec le Parti socialiste à des listes comprenant des candidats du Modem, des candidats de droite, des UMP camouflés, alors que tous approuvent sous des formes diverses le même fond de la politique réactionnaire menée dans notre pays au nom du sacro-saint libéralisme. Doit-on se satisfaire de n’importe quel fourre-tout pour avoir des élus à tous prix ?

L’examen approfondi qui sera indispensable, ville par ville, département par département, au lendemain des scrutins, ne pourra que constater notre effacement progressif, notre dilution.

Nous subissons de plein fouet la stratégie d’un Parti socialiste arc bouté pour nous damer le pion. C’est flagrant dans de nombreux endroits comme le département de la Seine Saint-Denis. Les socialistes agissent ainsi quand ils pensent que localement le moment est venu, avec l’objectif de nous écarter définitivement du jeu politique national.
La question n’est pas nouvelle. Elle remonte aux élections de 1977, 1983, 1989, 1995 et surtout 2001 avec la perte de 31 villes dont 20 de plus de 30 000 habitants. Nous payons très cher notre alignement sur la politique de Jospin avec la gauche plurielle : listes d’union aux régionales de 1998, aux régionales de 2004, accompagnées d’atermoiements, de revirements, de culbutes dans les impasses des collectifs antilibéraux, en finissant, au bout du compte, par refuser de présenter une candidature officielle du Parti communiste français aux présidentielles. Aujourd’hui notre image nationale est confuse, notre visibilité et notre crédibilité sont mises à mal, émoussées par une stratégie d’abandon de notre identité communiste.

Ce faisant, nous mettons dans l’embarras des communistes qui font le maximum, qui se battent sur le terrain des réalités locales pour affirmer l’identité de leur parti. Et paradoxalement, ces communistes-là ne sont pas les moins unitaires. Ils ne se livrent pas au désastreux marchandage des places mais défendent une conception pluraliste de la gauche, qui favorise les rassemblements utiles. Dès lors, c’est moins la composition des listes qui importe que la capacité des communistes à défendre en leur sein une conception combative de la politique, à défendre le rôle et la place du Parti communiste dans la vie nationale.

Il y a un enjeu national à ces élections dites « locales » : conquérir sur la droite le maximum de positions dans les communes et les départements pour organiser la résistance de la population contre la politique dévastatrice mise en œuvre par cette droite pétainiste depuis quelques mois. Il est juste d’appeler les électeurs à « sanctionner la politique de la droite » par leur vote, comme l’indique la déclaration du conseil national du PCF du 8 février dernier.

Tout le travail réalisé par les élus communistes est le plus souvent masqué, occulté, alors qu’il peut constituer un point d’appui, un atout pour valoriser leur rôle, leur engagement afin que le PCF ait toute sa place dans le pays. Les 21 régions conquises en 2004 devaient être des « remparts » contre la politique de la droite.
Il est souhaitable que les électeurs désavouent sévèrement la droite les 9 et 16 mars prochains. Le Parti socialiste en sera le grand bénéficiaire. J’espère pour ce qui nous concerne que nous pourrons limiter la casse, voire obtenir quelques succès

Le paysage politique sera changé après ces élections mais soyons lucides : Nicolas Sarkozy et la droite ne bougeront pas de cap. Ils poursuivront la révolution conservatrice, la révolution antirépublicaine.
C’est donc vers un aiguisement de la lutte de classe que nous allons. La vitalité d’un parti communiste à la fois ressourcé et modernisé devient l’urgence de l’urgence et serait un atout décisif pour ouvrir une perspective de changement de société. De ce point de vue, invoquer sans cesse la gauche comme seule alternative revient à mettre la charrue avant les bœufs. Le Parti socialiste aujourd’hui est porteur d’un projet d’adaptation du capitalisme : plus question de rupture, de socialisme. Et ne parlons surtout pas du communisme !

Raison de plus pour que le Parti communiste existe, avance son projet et ouvre un grand débat au sein de notre peuple sur la nécessité de changer de société, d’en finir avec le capitalisme, d’instaurer une République sociale et autogestionnaire, d’avancer vers le communisme. C’est bien dans le cadre d’un sursaut du peuple de France avec la renaissance du débat politique que la question des alliances se posera.
Le Parti communiste demeure largement perçu dans la population comme un parti de combat. Encore faut-il qu’il réponde aux attentes qui s’expriment à son endroit. Nous avons besoin d’un état des lieux sans complaisance pour reconstruire la force politique dont les classes populaires, les couches moyennes, le monde du travail et de l’industrie ont besoin. Un Parti communiste qui retrouve son ancrage passionnément au cœur du peuple, dans l’action concrète.

Renouer avec les classes populaires, cela exige en tout premier lieu d’investir les ghettos de la misère, de combattre la grande pauvreté qui s’étend, rendant la vie invivable pour des centaines de milliers de familles, femmes, enfants, jeunes, tant au plan matériel que social, psychologique, humain. Nous devons prendre le taureau par les cornes, dans les quartiers, avec nos militants pour lutter contre les trafics, les mafias, les intégrismes, pour organiser la solidarité concrète avec les immigrés et les salariés les plus pauvres. Nous devons inventer une nouvelle façon, plus « rentre dedans », de faire de la politique et de gérer les villes, à la mesure et en riposte à la politique agressive du capitalisme, face à l’américanisation de la France et à l’exclusion de millions de Français, réduits à l’état de sous-citoyens.

Le nombre d’élus communistes dans les institutions pèsera demain en France encore plus avec un Parti communiste capable de faire du neuf en toute indépendance, ayant coupé définitivement le cordon ombilical avec le parti socialiste, pris ses distances salutaires avec la démocratie libérale et un système politique mortifère, volant de ses propres ailes au service de la France.

Réinventons un Parti communiste ayant l’envie d’en découdre avec le capitalisme dans les entreprises et les quartiers. Relevons les défis du XXIe siècle, de la modernisation, du progrès social et humain, pour un mode de production écologique, pour le vivre ensemble, pour imaginer la cité idéale porteuse de bien-être, d’un art de vivre, du communisme au quotidien, pour sortir, comme disait Marx, de la préhistoire de l’humanité, pour ouvrir de nouveau les chemins de l’espoir et du renouveau, le chemin d’une gauche authentique.

Reçois, Chère Marie-George, mes fraternelles salutations.

André GERIN



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