Allauch : et si c’était un signe ?

vendredi 29 février 2008
par  Charles Hoareau
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Allauch est une petite commune de près de 20 000 habitants, située au Nord Est de Marseille. Dirigée par un maire de droite jusque dans les années 70, elle fut conquise par la gauche en 1975 suite à une décision préfectorale de casser l’élection d’une équipe aux relations douteuses dont le budget venait d’être rejeté, qui ne cessait de se déchirer dans les séances du conseil municipal et dont l’un des colistiers sera en 1981 compromis dans ce qu’on a appelé la tuerie d’Auriol. [1].

On est en pleine bataille du programme commun et la gauche de l’époque (PCF, PS, MRG) voit dans cette conquête un signe que l’union ça marche et que l’on peut mettre en place au niveau des communes si ce n’est des îlots de socialisme, du moins une véritable politique de gauche. Sous la conduite de Roland Povinelli, jeune maire PS mis en place alors et régulièrement réélu depuis, la nouvelle équipe travaille pour aller dans le sens d’une « gestion de gauche ». Non sans résultats. Ainsi Allauch est une des villes de France qui consacre le plus gros budget à l’éducation [2] alors que la fiscalité y est restée relativement stable et moins élevée que la Marseille voisine. [3]

Située au pied des collines de Marcel Pagnol, la commune comprend à peine 1000 hectares de terrains urbanisés ou urbanisables pour 4000 hectares de collines. La ville a préservé son environnement et fait figure de havre de paix à deux pas des quartiers nord et de ses cités populaires dégradées. Mais à quel prix ? Cette ceinture verte comme se plait à l’appeler le maire s’est faite par le biais d’une limitation stricte de sa démographie « grâce » à une politique municipale du logement aujourd’hui montrée du doigt par tout le monde et par une politique de non création d’emplois moins connue mais néanmoins bien réelle.

Allauch et Marseille vues des colinnes

Allauch d’abord ?

Depuis plusieurs mandatures toute la campagne de l’équipe en place s’est faite sur ce thème surprenant pour une municipalité qui se dit de gauche et donc en principe porteuse de valeurs de solidarité et de partage des richesses.

Allauch d’abord ça veut dire quoi ?
Moi d’abord les autres ensuite ?
Et qui sont les autres ?
Celles et ceux qui passés la pancarte (Allauch et Marseille se touchent) deviennent des étrangers, voire des hostiles ?
Celles et ceux, habitants de la cité HLM La Marie toute proche qui non seulement sont pauvres mais en plus souvent sont noirs ou arabes ?
Allauch d’abord fait incontestablement penser au slogan du FN Les français d’abord, slogan devenu dans la campagne des municipales marseillaises Les marseillais d’abord.

Vraies questions et fausses solutions

Pour résoudre les problèmes de l’emploi et du logement qui se posent avec force à Allauch [4], la municipalité loin de s’attaquer au fond des problèmes a voulu flatter l’électeur par un discours non seulement égoïste mais en plus complètement faux et menant à une impasse.

Logement

Le discours est faux

En effet si on regarde l’évolution démographique de la commune telle que donnée par la notice communale on s’aperçoit qu’en 30 ans de gestion le solde démographique naturel (la différence entre les naissances et les décès) est négatif de 465 personnes, alors que s’il y avait eu une évolution comparable à celle nationale le solde aurait été positif de 1500 personnes environ. Le résultat de la politique municipale est là : les allaudiens « de pure race » sont donc une espèce en voie de disparition ! A l’inverse l’augmentation de la population est due à une « invasion » de 7758 marseillais, aubagnais, voire même horreur suprême de gens même pas de Provence…Que font les services municipaux chargés du contrôle aux frontières communales ?!

La politique restrictive et sélective en matière de logements a conduit la mairie à la poursuite de son rêve de « petit Neuilly de Marseille » [5] à favoriser une sélection par l’argent et donc une flambée du prix des loyers et des acquisitions. Or Allauch n’est pas à l’origine, ni même encore aujourd’hui une ville habitée par une majorité de gens fortunés. Le revenu moyen, bien que supérieur à Marseille (ville où la moitié de la population ne paie pas l’impôt sur le revenu) est inférieur à bien des villes du département. Du fait de cette flambée les jeunes allaudiens sont donc aujourd’hui contraints de quitter leur commune natale pour trouver à se loger. Pour eux le Allauch d’abord est devenu le Allauch dehors, c’est la raison principale du solde naturel négatif de population.

Une impasse

Jusque dans les années 80 les maisons qui se vendaient sur Allauch étaient majoritairement achetées par des salariés à statut qui pouvaient accéder à une maison de village ou à un appartement dans une copropriété située au pied des collines. Aujourd’hui ce n’est quasiment plus le cas et s’il n’est pas mis un coup d’arrêt à cette politique on assistera à un changement de population dans une commune dont les personnes aux revenus modestes seront exclues. Les maisons qui se construisent sont pour des habitants au revenu confortable et qui de fait votent majoritairement à droite ce qui a fait dire à l’ineffable Povinelli « Je suis le seul maire socialiste d’une ville de droite ». C’est ce constat qui l’a conduit à faire alliance avec l’UMP en espérant refaire le coup des dernières élections où il y avait une seule liste présente [6]

Emploi

Cette politique de fermeture est aussi une politique de fermeture à d’emploi, préoccupation pourtant première des allaudiens si on en croit un sondage de février 2006. Préoccupation première à laquelle la mairie n’a pas répondu et ne répond toujours pas dans le matériel de campagne volumineux qu’elle diffuse ces temps ci dans les boites au lettres. Dans ce domaine la mairie n’a aucune proposition concrète. Pourtant, outre les 13,6% de chômeurs, sur 7500 allaudiens actifs, seuls 1500 travaillent sur la commune qui offre à peine plus de 3000 emplois. Sous le couvert d’un souci légitime de préservation de la nature le maire refuse toute activité productrice nouvelle, refus qu’il illustre sur son matériel de campagne par une photo d’une usine enfumée barrée de rouge…comme si l’emploi ne pouvait être que de l’activité polluante.
Sous sa conduite Allauch risque de devenir une cité dortoir vieillissante.

L’autre aspect et non des moindres c’est que sans entreprises la commune ne bénéficie pas des retombées économiques et fiscales d’une activité. De fait Allauch vit sous perfusion du Conseil Général [7] et par l’endettement qui atteint la jolie somme de 994€ par habitant. Ce système atteint aujourd’hui ses limites ce que Povinelli reconnaît implicitement dans son matériel de campagne quand il écrit : « aucun équipement d’envergure ne sera réalisé (…) aucun nouveau service ne sera créé afin de ne pas augmenter le personnel municipal ».Et continuant les fausses réponses le premier thème mis en avant dans le même matériel pour une commune qui a pour slogan Un certain art de ville...c’est la sécurité et le seul projet important annoncé se révèle être la vidéosurveillance !
Le rêve se fissure…

Enfin la gauche !

Excédés par les propos populistes et la dérive droitière de plus en plus marquée, de sa suffisance Povinelli 1er, éléments qui s’accompagnent d’un clientélisme et d’un autoritarisme grandissants, [8] en septembre une poignée d’allaudiens décide de se faire entendre. Militants du collectif antilibéral, de la LCR, de Rouges Vifs ou tout simplement citoyens du peuple de gauche, celui qui a dit NON à la constitution européenne, ils se réunissent régulièrement, font une première réunion publique et décident de lancer une liste dont le titre à lui seul résume l’état d’esprit : « Enfin la gauche à Allauch ! ».
La mayonnaise prend.

De son côté le PCF, qui espérait jusqu’au bout reconduire l’union passée, finit par y renoncer, annonce en janvier les raisons de la rupture avec l’équipe Povinelli et rejoint la liste Enfin la gauche à Allauch ! qui se trouve donc soutenue par le collectif antilibéral, LCR, PCF, Rouges Vifs, bref la gauche, la vraie !

Et c’est une équipe pleine de dynamisme qui fait campagne au porte à porte, aux sorties des écoles et sur les lieux publics. Une équipe qui se bat sur ses valeurs : droit à l’emploi, au logement, au transports, à la santé. Une équipe qui met l’accent sur les services publics et sur une autre logique pour Allauch, une logique de progrès social pour tous.

Le 6 mars [9] aura lieu une réunion publique unitaire où interviendront André Gérin, le député maire de Vénissieux, Samuel Johsua le dirigeant de la LCR, Jacques Lerichomme membre du collectif national unitaire, mais aussi des syndicalistes, des militants associatifs…et bien sûr Gilles Viallon, tête de liste, ancien candidat PCF aux dernières cantonales et tous les candidats de la liste.

Nul doute que le contenu de cette union, ses contours, le contexte de la commune et la proximité de la grande métropole, feront que cette soirée aura un retentissement qui dépassera le cadre d’Allauch. N’en déplaise aux tenants du repli sectaire : solidarité et justice d’abord !

blog de campagne : http://elgaa.blogspot.com/


[1Toute une famille avait été décimée dans le village d’Auriol par un commando du SAC, la police parallèle de Pasqua

[22565€ euros par an et par enfant soit quatre fois plus que la moyenne nationale, selon l’équipe sortante

[3mais bien sur bien plus élevée que d’autres communes du département où l’emploi y est bien plus développé

[4la ville compte plus de 13% de chômeurs « officiels » et, avec un taux de 2,6%, - ce qui lui coûte près de 200 000 euros annuels d’amendes - elle est la lanterne rouge des logements sociaux

[5Dans La Provence du 18/11/05 Povinelli se félicitait « qu’Allauch soit le petit Neuilly de Marseille et avait rajouté qu’il ne voulait « que des gens respectueux sur la commune » (sic !)

[6PS, PCF et …divers ambidextres

[7dont le président Guérini est lui aussi un PS champion de l’ouverture à l’UMP voir édito du mois

[8Ici plus qu’ailleurs il vaut mieux être encarté PS si on veut espérer un emploi communal ou para communal. Aux meetings de l’omnipotent les personnels sont fermement conviés et pendant la campagne électorale on voit de drôles de colleurs d’affiches en bleu de travail intervenir à toute heure de la journée pour recouvrir toute expression qui n’a pas l’heur de plaire au maire. Sans parler de ces salariées venues se plaindre à plusieurs reprises à l’union locale CGT voisine, du harcèlement du maire et de la hiérarchie à son service.

[9à 18h 30 au gymnase de Pié d’Autry



Documents joints

Classement fondation Abbé Pierre
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