Casse tête chinois

dimanche 19 novembre 2006
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C’est la nouvelle donne internationale, le poids grandissant de la Chine dans les échanges internationaux et sa présence de plus en plus importante en Afrique.
Cela interroge voire inquiète nombre d’africains, ici un article paru au Cameroun.

Napoléon le disait : “Quand la Chine s’éveillera, le monde tremblera.” L’empire du Milieu est devenu une sorte de supermanufacture du monde, et les effets s’en ressentent un peu partout. Sa main-d’Å“uvre bon marché entraîne de nombreuses délocalisations et la fermeture de nombre d’usines en Europe, où l’industrie textile en particulier est déjà en crise.

La menace chinoise est si réelle que les Occidentaux parlent ouvertement de “péril jaune” et n’hésitent pas à utiliser des moyens extrêmes pour y résister. Aux Etats-Unis, la Chambre des représentants a ainsi voté une résolution demandant au gouvernement américain de bloquer, au nom de la “sécurité nationale”, le rachat du pétrolier américain Unocal par une compagnie chinoise.

Mais, s’il y a un domaine où l’Occident ne pourra que subir les effets de la puissance chinoise, c’est bien la consommation énergétique. La Chine consomme désormais plus de charbon, de minerai de fer ou de céréales que les Etats-Unis, ce qui a pour effet d’affoler considérablement les cours : par exemple, 71,5 % d’augmentation en 2005 pour le fer. Le pétrole, c’est pire : la Chine absorbe désormais 8 % du précieux or noir extrait du sol partout dans le monde. L’institut de recherche américain Earth Policy Institute estime très sérieusement que, si la Chine devait adopter le mode de vie des Américains, qui dilapident l’énergie à souhait avec leurs gros 4 x 4, cela donnerait lieu à un vrai cauchemar économique et écologique.

L’économie africaine n’en profitera pas

En Afrique, l’industrie textile est frappée de plein fouet par l’éveil de la Chine. L’Afrique du Sud, par exemple, qui a pourtant rompu ses relations diplomatiques avec Taïwan en 1997 pour se rapprocher de Pékin, ne voit pas toujours le dynamisme chinois d’un très bon Å“il. En septembre 2004, l’une des principales organisations membres de la puissante fédération syndicale sud-africaine, la COSATU, a menacé de boycotter les vendeurs de produits chinois, accusés de contribuer à la montée du chômage. Les syndicats sud-africains ont même demandé au gouvernement l’application de restrictions à l’importation de produits chinois pour protéger la main-d’Å“uvre nationale.

C’est là l’une des limites de la politique commerciale chinoise en Afrique, officiellement fondée sur le “win-win”, le système “gagnant-gagnant”.
Le partenaire chinois ne donne pas l’impression de se préoccuper réellement de la création d’emplois rentables sur le continent. Très souvent, il fait réaliser ses travaux en Afrique par de la main-d’Å“uvre chinoise. Par exemple, la Chine accorde à l’Angola un crédit de 1,2 milliard de dollars et prévoit que seulement 30 % de crédit pourrait être alloué à des entreprises angolaises ; 70 % des sommes iront donc à des entreprises chinoises et, partant, à la main-d’Å“uvre chinoise.

La plupart des Africains qui trouvent du travail dans des structures chinoises se plaignent généralement de ne pas être bien payés et d’avoir des conditions de travail pénibles. Le mode de développement chinois recouvert du vernis de la coopération Sud-Sud ne serait-il alors qu’une nouvelle forme d’exploitation de l’Afrique ?

Les Chinois ne sont pas de bons Samaritains

Les Africains ont sans doute le droit d’embrasser leur partenaire chinois. Mais, de là à penser que les Chinois viennent investir sur le continent pour aider l’Afrique, il y a un pas que les Africains auraient tort de franchir vite. Il ne faut pas prendre la Chine pour ce qu’elle n’est pas. Les Chinois ne sont pas de bons Samaritains. L’Afrique semble n’être qu’un eldorado qui leur permet de subvenir à leurs besoins de survie et d’assouvir leur soif de grandeur.

Besoins de survie d’abord. La poursuite à un rythme accéléré de son développement condamne la Chine à une recherche effrénée de ressources énergétiques. Elle trouve dans l’Afrique un réservoir de pétrole accessible et bon marché. Elle va y puiser abondamment. Au passage, elle récupère une partie des sommes dépensées dans l’achat du pétrole, en écoulant sur le vaste marché africain toutes les “chinoiseries” sorties de son industrie, supermanufacture du monde. Plus encore, le projet de création de tout un quartier chinois à Luanda, la capitale de l’Angola, laisse penser que certains pays africains pourraient demain servir de colonies de peuplement à la Chine.

Soif de grandeur ensuite. La Chine ambitionne de devenir le pays le plus puissant du monde. Dans cette perspective, l’Afrique peut être un champ d’expérimentation du leadership qu’elle veut se donner. Jusqu’ici, la Chine entretenait des relations bilatérales suivies avec chacun des pays africains pris individuellement. Aujourd’hui, elle se sent capable de leur parler à tous. Il y a ainsi des signes qui ne trompent pas. Il y avait des sommets France-Afrique et il y a maintenant des sommets Chine-Afrique. Et demain, peut-être, il y aura une Chinafrique comme il y a une Françafrique. En tout cas, l’Afrique étant devenue stratégique pour la survie de la Chine, celle-ci sera de plus en plus tentée de s’ingérer dans la gestion des pays africains. La superpuissance chinoise s’éveille en Afrique.

Le Messager, Douala

Transmis par Linsay



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